C’est au travers de la complicité des autres Etats et des compagnies internationales que le pays est capable de se soustraire à sa responsabilité.
Il y a deux ans j’ai participé à la « Balade du Retour » aux côtés de centaines de cyclistes de Palestine et d’autres pays. La course allait de Ramallah à Bil’in, tout du long à travers la Cisjordanie Occupée.
Comme à l’accoutumé, les forces d’occupations israéliennes ont fait une descente dans le village avant même le début de la course. Je tenais mon vélo, lorsque j’ai été arrêté, quand j’ai alors été jeté par terre – avec à un moment des dizaines de soldats autour de moi – quand tout ce que je faisais était d’essayer d’enfourcher ma bicyclette et d’expliquer aux soldats qu’ils étaient sur ma terre. J’ai ensuite été maintenu en détention pendant 11 jours.
Malheureusement, mais peut-être sans surprise, ce n’était pas ma première arrestation. En tant que défenseur bien connu des droits de l’homme, j’ai en fait été arrêté des dizaines de fois pour avoir protesté de façon non-violente contre les politiques racistes d’Israël. En 2008 m’a été décernée à Berlin la Médaille Carl Von Ossietzky [1] pour services exceptionnels pour la réalisation des droits de l’homme. La haute représentante de l’Union Européenne (UE), Catherine Ashton, a déclaré en août 2010 que l’UE considérait que j’étais « un défenseur des droits de l’homme qui se consacrait à des protestations non-violentes. » Mais Israël s’obstine à m’emprisonner, en me punissant moi et la collectivité citoyenne pour nos efforts pour sauver Khan al-Ahmar, un des 46 villages bédouins palestiniens qu’Israël projette de démolir pour construire davantage de colonies illégales. La résistance palestinienne a, pour le moment, reporté le moment de la démolition.
Malgré la répression a laquelle nous avons fait face, tous mes procès ont eu lieu dans le cadre d’un tribunal militaire, ainsi que c’est la règle pour les Palestiniens en Cisjordanie, tandis que les colons israéliens sont jugés devant des tribunaux civils. Ce système de deux poids, deux mesures, n’est qu’un des exemples des preuves abondantes qui ont conduit à la publication du rapport de l’ONU sur « Les politiques israéliennes et la Question de l’Apartheid », qui affirme qu’ Israël applique en effet un régime d’apartheid au peuple palestinien.
Et j’ai donc été attristé d’apprendre que la banque britannique HBSC [2] procéderait à des investissements dans des sociétés fournissant des armes à Israël. Mais je n’ai pas été surpris. C’est par la complicité avec d’autres états et des sociétés internationales qu’Israël est en mesure d’éviter d’avoir à rendre des comptes, en ne payant pas le prix de ses violations du droit international et des droits des Palestiniens. Le manque de sanctions de la part des Etats à l’encontre des politiques racistes d’Israël, et la recherche par les sociétés de profits tirés des violations de nos droits, permet à Israël de maintenir son régime d’apartheid, de colonialisme et d’occupation.
Comme toutes les grandes sociétés, HSBC utilise différentes stratégies de commercialisation pour se présenter. Pour citer un exemple décisif, HSBC est le principal parrain de la Fédération Britannique de Cyclisme – une tentative évidente de « blanchir » son image par le sport. Dans un esprit de solidarité internationale, j’appelle personnellement les cyclistes de tout le RU à ne plus accepter le parrainage de HSBC jusqu’à ce qu’elle retire ses investissements des sociétés fournissant des armes à Israël. Ces sociétés profitent directement de la mise au point d’armes pour nous estropier ou nous tuer et pour consolider l’oppression qu’Israël exerce sur nous.
Mon histoire et l’histoire de tout Palestinien doivent être entendues alors que nous résistons sous le poids du régime d’oppression par Israël. Même si je serai probablement envoyé bientôt en prison, je continuerai à me battre pour la liberté la justice et l’égalité des droits des Palestiniens, et j’espère qu’autant de gens que possible de par le monde nous rejoindront moi et mes camarades palestiniens dans cette lutte. C’est précisément pourquoi aucun cycliste de conscience ne doit accepter le parrainage par une société fournissant des armes à l’apartheid israélien.
Traduit de l’anglais par Y.J. membre du Groupe de Travail de l’AFPS sur les prisonniers politiques palestiniens.
[1] Carl von Ossietzky (1889- 1938) est un journaliste, écrivain et intellectuel pacifiste allemand, lauréat du Prix Nobel de la Paix en 1935. Condamné en 1931 pour haute trahison après avoir publié des informations sur le réarmement clandestin de l’Allemagne, il est mort en 1938 des suites de sa détention en camp de concentration allemand. La Médaille qui porte son nom est depuis 1962 attribuée chaque année par la Ligue internationale des droits de l’Homme à des citoyens ou des initiatives qui font avancer les droits fondamentaux. En 2008, la Médaille a été attribuée conjointement aux Anarchistes contre le Mur, association israélienne, et au Comité Populaire de Bil’in d’où est originaire Abdallah Abu Rahmah. En 2010, elle a été attribuée à Mordechai Vanunu, atomiste israélien, qui a continué à la mise au point de la bombe atomique par Israël ; il a été condamné à la prison pour avoir révélé qu’Israël possédait l’arme atomique ; aujourd’hui libéré, il est interdit de sortie d’Israël.
[2] HSBC : Hong Kong and Shanghai Banking Corporation. Selon Mediapart c’est « une banque au lourd passé et au présent sulfureux ». En 2014 elle emploie 260.000 personnes, est présente dans 75 pays et déclare 54 millions de clients. Fondée dans le sillage de la victoire britannique contre la Chine dans les deux guerres de l’opium au XIXe siècle, elle a été mêlée au commerce international de drogue dures. Plus récemment, elle a été impliquée dans des affaires de blanchiment d’argent, de terrorisme et de trafic financier ou d’assurances.
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