De Capi Corsu à Bunifaziu, un peuple en lutte pour sa survie.
Cette semaine dédiée aux prisonniers politiques permet en effet de le rappeler.
Après 38 ans de combat pour la reconnaissance du peuple corse et de son droit à l’autodétermination, les patriotes corses sont encore nombreux à croupir derrière les murs du jacobinisme et de l’impérialisme français. Malgré toutes les souffrances que cette situation engendre, il nous faut rester lucides et comprendre que tout cela n’est pas vain.
En effet, depuis quelques années une avancée significative de la revendication nationale s’est concrétisée par des votes historiques à l’Assemblée de Corse en faveur de l’officialisation de la langue corse et du statut de résident. Une forte poussée de l’autonomisme a également permis de mesurer à quel point le nationalisme s’est popularisé au sein de notre peuple et de la société insulaire. Il s’agit cependant de s’interroger sur un fait bien précis. Cette évolution certaine des consciences n’est-elle pas détournée par des gens qu’il devient de plus en plus osé de qualifier de nationalistes? En témoignent les dernières élections municipales où le compromis et la connivence avec les partis français ont été le mot d’ordre, à Bastia comme à Purti-Vechju. Les douleurs endurées par les militants indépendantistes depuis 1976, principaux artisans de cet éveil national, commencent à porter leurs fruits et pourtant d’autres qu’eux s’occupent de la récolte.
La stratégie de rapprochement avec les autonomistes que la lutte de libération nationale a tenté d’opérer a été réduite à néant par les déviances et les dérives politiciennes de ceux qui, tout en se revendiquant de la Nation corse, arborent aujourd’hui fièrement l’écharpe tricolore. Aussi faut-il leur rappeler, à ces tenants de la « révolution tranquille » et de la trahison décomplexée, quelques terribles réalités. C’est que le drapeau français qu’ils n’ont apparemment plus de peine à brandir aujourd’hui est le même que ceux qui flottent sur les miradors des établissements pénitentiaires dans lesquels nous autres, prisonniers politiques, partisans indéfectibles de l’indépendance nationale, sommes détenus et exilés. Il est le même qui sont suspendus aux frontons des Palais de Justice où nous sommes systématiquement poursuivis et condamnés à des années d’incarcération. Quant à ceux avec qui ils ont pactisé pour renverser la dynastie Bastiaise, ne représentent-ils pas pour les uns une gauche jacobine qui s’est toujours opposée à l’émancipation de notre peuple et notamment à la coofficialité de la langue corse, et pour les autres une droite libérale qui a théorisé la « désanctuarisation de la Corse » et la bétonnisation de nos côtes? Et quel horrible spectacle de voir tout ce beau monde tenter de justifier l’injustifiable sous le buste du Général Paoli, le père de l’indépendance, qui lui est mort en exil pour avoir refusé ce genre de compromission. Est-il encore possible de s’accommoder de tout cela? Certainement pas. Du moins, pas pour des militantes et des militants qui vivent leur engagement politique jusqu’au plus profond de leur être ou entre les quatre murs d’une cellule.
À la vérité, il ne s’agit plus aujourd’hui de divergences entre des nationalistes légalistes et d’autres nationalistes partisans de la lutte clandestine. Non. L’autonomisme nationaliste a en partie dérivé, du moins en ce qui concerne ses cadres, vers un régionalisme néoclaniste prêt à pactiser avec n’importe qui pour arriver aux responsabilités, tout en prenant soin de marginaliser la lutte de libération nationale incarnée par Corsica Libera. Cette nouvelle donne doit à l’évidence remettre en cause beaucoup de choses car nous ne pouvons pas indéfiniment tenter de nous rapprocher de gens qui nous fuient et, quand ils le peuvent, nous rejettent. L’indépendantisme n’a pas vocation a être l’éternelle force d’appoint de la modération, mais doit représenter une véritable alternative, une implacable force d’émancipation nationale, de changement sociétal et de justice sociale. C’est en s’assumant elle-même, en renouant avec une ligne dure et contestataire, en renouant avec le militantisme de terrain que la lutte de libération nationale pourra capitaliser politiquement, renforcer sa position et étendre son champs d’influence. La jeunesse en particulier, organisée au sein de la GI, doit contribuer à porter cette dynamique nouvelle, en totale cohésion avec Corsica Libera et toutes les structures historiques de la lutte, notamment syndicales.
Les combattants clandestins auront sans doute un rôle prépondérant à jouer durant cette nouvelle période qui semble se profiler. L’existence du peuple corse est toujours niée par l’État français et avec elle son droit à l’autodétermination. Cette situation n’est en rien inédite et, à elle seule, rend légitime l’utilisation du moyen militaire. Les rapports de force ayant aujourd’hui changé, il s’agira peut-être de favoriser les moyens d’actions délaissés depuis quelques années au profit de la lutte institutionnelle.
Quoi que peuvent en dire quelques pseudos analystes partisans, le FLNC représente plus que jamais une arme de changement et de progrès pour la Corse et son peuple. Il est à l’origine du sursaut national de ces 40 dernières années et il continuera à l’avenir d’être le pilier de la lutte d’indépendance. Il ne représente ni plus ni moins que les aspirations d’une jeunesse qui veut rompre avec le système colonial et claniste. Il incarne les espérances et les sacrifices de milliers d’hommes et de femmes ainsi que la parole d’un peuple sans État, nié et marginalisé sur sa propre terre qui a finalement préféré la résistance acharnée plutôt que l’agonie passive.
Une parole que les prisonniers politiques doivent continuer de soutenir, même de là où ils sont. Une parole qu’ils se doivent de respecter par leur dignité et leur fidélité. Une parole qu’ils se doivent de porter jusqu’au devant des tribunaux de l’impérialisme français avec l’inflexibilité de ceux qui savent que, un jour ou l’autre, la Nation corse sera reconnue dans son existence et rétablie dans ses droits historiques.
EVVIVA A CORSICA NAZIONE !
A NOSTRA CUSCENZA HÈ RESISTENZA !
Nicolas Battini
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