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« Mon père a été emprisonné car il croit que la Palestine doit être libre »

17avril 1 mars 2018 Commentaires fermés sur « Mon père a été emprisonné car il croit que la Palestine doit être libre »

L’occupant israélien pense que mon père, l’organisateur non-violent Munther Amirah, est une menace pour le système d’apartheid parce qu’il diffuse l’espoir à notre communauté.

Je suis née à une époque où les gens croyaient que l’occupation israélienne appartiendrait bientôt au passé. Après la signature de l’accord d’Oslo, mon père était sûr qu’il n’y aurait plus aucune occupation israélienne au moment où j’entrerai à l’école. De longues années ont passé. J’ai maintenant 23 ans et j’ai tout récemment obtenu mon diplôme d’avocat. Mais mon père, Munther Amirah, est maintenant dans une prison israélienne.

Mon père exerce la fonction de coordinateur du Comité Populaire de Lutte et est l’ancien secrétaire général du Syndicat Palestinien des Travailleurs Sociaux et des Psychologues. Les soldats israéliens l’ont arrêté il y a plus d’un mois à Bethléem parce qu’il manifestait contre la décision des U.S.A. de reconnaître Jérusalem comme la capitale d’Israël. Depuis lors, un tribunal militaire israélien a maintenu mon père en prison, même s’il n’a pu prouver aucune des accusations sans fondement contre lui.

Evidemment, les Israéliens ne déclareront pas à haute voix les vraies raisons de son arrestation. Ils savent que mon père est innocent de ce dont il est accusé, mais il veulent faire accepter par mon père et par tous les Palestiniens la négation systématique de nos droits. Israël continue à frapper tout Palestinien qui combat et qui résiste à l’occupation de quelque manière, façon, ou forme que ce soit : soit en se servant du droit international, en encourageant le mouvement de BDS, soit tout simplement en manifestant dans les rues. Dans le cas de mon papa, le tribunal militaire israélien envoie un message d’intimidation à tous ceux qui défient leur régime d’apartheid et sortent dans la rue pour manifester — même de façon non-violente— pour la liberté et la justice.

Le juge militaire a été certainement irrité lorsque mon père a déclaré que selon le droit international Bethléem ne fait pas partie d’Israël et que par conséquent il n’avait besoin de la permission des Israéliens pour manifester contre la décision de Trump. Je suis aussi certaine que le juge a été également fâché quand mon père a dit que l’occupation par Israël ne faisait que pousser à davantage de violence. Après de longs interrogatoires qui ont privé mon père de tout sommeil, ceux qui ont ordonné son emprisonnement ont certainement été contrariés par son moral élevé, même quand il a été amené devant le tribunal.

Mon père fait ce que quiconque doit faire dans une situation d’injustice : s’y opposer. Mais il ne nous est pas toujours facile d’accepter les risques qu’il prend pour sa liberté et pour sa vie. En fait, il était censé être à l’hôpital au moment de son arrestation : il avait de la fièvre en raison d’une grave infection, en plus de souffrir d’hypertension. Bien qu’il connaissait les risques d’aller manifester, il était fermement convaincu qu’il était de son devoir d’y participer, en dépit de son état physique

Ma mère est très forte et mes quatre frères et soeurs et moi l’avons aidée à garder espoir. Les plus jeunes, Youmna, 12 ans, et Mohammad, 8 ans, sont très inquiets de savoir quand ils pourront l’embrasser de nouveau. Ils comprennent que nous vivons sous une occupation autoritaire, mais ils ne se rendent pas compte en quoi la participation à une manifestation est une raison susceptible pour arrêter notre père.

Youmna et Mohammad vont à l’école au Couvent Salésien de Crémisan, situé dans une magnifique vallée où Israël étend ses colonies et construit le mur d’annexion. Il y a plusieurs années, un prêtre de cet endroit a décidé de manifester contre ceci en organisant chaque vendredi une messe en plein air. Et donc nous nous sommes joints à notre père pour prier en faveur de la justice et de la paix. Des expériences comme celle-ci m’ont rendue encore plus admirative de mon père — pour nous avoir enseigné que chacun a un role à jouer dans notre lutte pour la liberté. Ceci englobait une musulmane comme moi se joignant à une prière chrétienne, et nous avons été témoins de ceci, aussi, dans les manifestations en juillet dernier pour la Mosquée Al Aqsa à Jérusalem, quand des Chrétiens se sont joints aux fidèles musulmans.

Tant que les Etats-Unis menacent notre peuple de sanctions, et tant que l’Europe continue à dorloter Israël, l’occupant reste sûr qu’il ne paiera aucun prix. Malgré tout, l’occupation israélienne ne pourra pas corrompre notre dignité ou briser notre volonté.

Après une existence sous l’occupation d’Israël, cette expérience ne fera que rendre mon père plus fort. L’occupant israélien pense que mon père, un militant non violent, est une menace pour son système d’apartheid parce qu’il diffuse l’espoir à notre communauté. Il résulte de ses enseignements que j’aspire à devenir une avocate des droits de l’homme — et nous continuerons à organiser nos communautés, à manifester et à mener des campagnes jusqu’a ce que la Palestine soit libre.

Quand je suis née chacun se préparait à avoir un état indépendant. Je ne sais pas si la libération est en train ou pas de venir bientôt. Mais j’ai appris de mon père que nous tenons le droit de défendre nos droits. Considérez ceci comme le témoignage d’une fille fière dont le père est dans une prison israélienne pour le « crime » d’avoir cru que la Palestine sera libre.

Ghaïda Amira

L’auteur est une jeune Palestinienne du Camp de Réfugiés d’Aïda à Bethléem. Elle a récemment obtenu un diplôme en droit de l’Université Al Ahliyya de Palestine. Elle aimerait se spécialiser en droit international humanitaire.

Traduction : Y. Jardin pour l’AFPS

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